Voyelles

Voici le célèbre poème d'Arthur Rimbaud, Voyelles. Ce document apporte un complément d'information au cours sur la couleur et la colorimétrie.
A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

Golfes d'ombre ; E, candeur des vapeurs et des tentes,
Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;

U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides
Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silence traversés des Mondes et des Anges :
- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux ! -

A. Rimbaud
Commentaire personnel : on voit tout de suite que les voyelles ne sont pas rangées de la façon habituelle que l'on nous apprend à l'école primaire en France, à savoir "a,e,i,o,u". Ici l'auteur à choisi d'inverser le "o" et le "u", comme pour signifier le début et la fin : le "a" de alpha au début et le "o" de omega pour la fin. Toutes les couleurs ne sont pas indexées sur une voyelle, vous voyez qu'il manque le jaune. Néanmoins cette palette permet de reproduire 16 millions de couleurs, nous avons bien en effet du Rouge, du Vert et du Bleu, qui vous fait penser comme à moi au RVB des écrans de nos ordinateurs ou de nos téléviseurs, la luminosité étant réglé avec le noir (le A) et le blanc (le E).
Bien entendu Arthur Rimbaud n'a pas pensé à cela, mais il me revient ce texte :
Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant.
Le Poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. Toutes les formes d’amour, de souffrance, de folie ; il cherche lui-même, il épuise en lui tous les poisons, pour n’en garder que les quintessences. Ineffable torture où il a besoin de toute la foi, de toute la force surhumaine, où il devient entre tous le grand malade, le grand criminel, le grand maudit, — et le suprême Savant — Car il arrive à l’inconnu ! Puisqu’il a cultivé son âme, déjà riche, plus qu’aucun ! Il arrive à l’inconnu, et quand, affolé, il finirait par perdre l’intelligence de ses visions, il les a vues ! Qu’il crève dans son bondissement par les choses inouïes et innombrables : viendront d’autres horribles travailleurs ; ils commenceront par les horizons où l’autre s’est affaissé !
Arthur Rimbaud - Lettre à Paul Demeny - Charleville, 15 mai 1871.

Voir aussi La symphonie pastorale d'André Gide.
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© Serge RENOUD

Dépôt légal en décembre 1999

 informations en annexe au cours complet de sérigraphie.